Bienvenue Marie

par | 26 Avr 2020 | Nouvelles

Bienvenue Marie

  • 26/04/2020

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Marie a peur.

Sous ses yeux d’enfant apeuré, elles bougent. Ces choses sur les murs et sur le sol, qui avancent vers elle, tels des serpents.

D’effroyables serpents.

Des larmes coulent sur ses joues, elle ferme les yeux.

     Marie Eberth court dans les rues de Londres. En retard pour son travail, le premier jour en plus. Elle se précipite, évite les autres personnes présentes, se fait presque renverser par une voiture et finalement arrive, essoufflée, mais en un seul morceau, devant les locaux de son tout nouveau travail.

Après de grandes études brillamment réussies en psychologie Marie est prête à entrer dans le monde du travail et à faire ses preuves.

Tremblante, elle pousse la porte. Un long couloir peu éclairé s’étend devant elle. Le sol de marbre fait claquer ses chaussures dans un son qui se répercute contre les murs sombres. Elle ne sait pas vraiment où elle doit se rendre, alors elle avance en observant les tableaux et les noms sur les portes.

Docteur Edward Bord…

Docteur Olivia March…

Docteur Marie Eberth…

Son bureau ! Son bureau ? Elle ne devait être qu’assistante du Docteur Staud. Il n’avait jamais été question d’avoir son propre bureau. Étonnée, elle ouvre timidement la porte.

Jetant un coup d’œil avant d’entrer, elle aperçoit un monumental bureau en bois sombre, sur un tapis persan ainsi qu’une bibliothèque derrière, prenant l’espace de tout un mur. Plus loin d’un côté de la pièce un canapé en cuir noir sur lequel était posée une petite boîte.

Marie entre prudemment et s’avance vers la boîte. Il s’agit d’une boîte en bois verni. Elle la soulève délicatement. Sur le dessus un morceau de papier fixé avec un peu de colle.

Bienvenue Marie.

Marie fait une grimace. Certes elle est jeune et sort à peine des études mais se faire appeler par son prénom sur son lieu de travail. Elle est adulte tout de même.

Elle ouvre légèrement la boîte et sursaute. Une boîte à musique.

La sonate au clair de lune de Beethoven résonne à ses oreilles. Elle ouvre entièrement la boîte et une danseuse vêtue d’un tutu rose tournoie sur elle-même.

Marie se laisse bercer par la mélodie, comme hypnotisée. Ses yeux ne pouvant se détacher de la danseuse qui tourne encore et encore…

Derrière elle la porte claque, sous la surprise elle lâche la boîte. Elle se retourne tout en demandant.

— Mr Staud ?

Le silence.

Elle fait un pas vers la porte, puis un autre et finalement arrive jusqu’à elle. Elle lève sa main vers la poignée, la saisit, l’abaisse.

Le couloir au sol de marbre et aux murs sombres. Rien d’autre.

Sa respiration s’accélère.

Rien d’autre, plus aucun tableau, plus aucune porte.

Mais au bout du couloir commencent déjà à se mouvoir les ombres… Celles de ses cauchemars d’enfance.

La peur au ventre, elle ne bouge plus et observe lentement les formes indistinctes se diriger vers elle. La terreur l’emportant elle recule dans la pièce et referme la porte. Elle se précipite derrière le bureau, s’y accroupit et ferme les yeux, espérant vainement que tout disparaîtra quand elle les ouvrira. Plissant les yeux le plus fort possible, elle murmure son mantra d’enfant, celui que ses parents lui avaient appris pour faire fuir les cauchemars.

— Les ombres n’existent pas. C’est un cauchemar Marie, et les cauchemars ne sont pas réels.

Entendant la porte s’ouvrir Marie ouvre les yeux. Elle se colle le dos contre le bureau, respirant à peine. Ses lèvres tremblent, elle serre les dents pour les empêcher de claquer et ferme à nouveau ses yeux. Elle sent un souffle glacé dans sa nuque mais s’interdit de regarder. Un sifflement strident retentit juste à côté de son oreille mais elle ne fait aucun mouvement. Quand soudain une pression se fait sur sa gorge elle ouvre les yeux et tente de pousser un cri. Trop tard. Elle essaye de s’accrocher au bureau mais rien ne la sauvera et elle le sait. La lumière s’éteint et plus aucun bruit ne se fait entendre.

Un homme aux cheveux grisonnants ouvre la porte du bureau. Sur cette porte le nom du Docteur Staud est inscrit.

Il entre et aperçoit une boîte renversée sur le sol. Il s’avance vers elle, la ramasse. Pour la deuxième fois la sonate au clair de lune se fait entendre, et de dos, l’homme ne peut voir la main d’ombre attraper la poignée de la porte avant de la claquer avec force.


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